Les compétences psychosociales pour tous d’ici 2037, une aventure inédite en France !

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Pour la santé et le bien-être des enfants, le développement des compétences psychosociales sera t-il bientôt au coeur de notre projet de société ? C’est toute l’ambition d’une stratégie nationale, lancée sur les 15 ans à venir, pour améliorer nos capacités à faire face aux exigences et aux défis de la vie quotidienne. Où en est-on actuellement sur la question des CPS ? Quels points de vigilance et axes prioritaires pour répondre collectivement à cette ambition ? - INTERACTIONS SANTE juin 2023 "Les compétences psychosociales pour tous d’ici 2037, une aventure inédite en France !"

Pour la santé et le bien-être des enfants, le développement des compétences psychosociales (CPS) sera t-il bientôt au cœur de notre projet de société ? C’est toute l’ambition d’une stratégie nationale, lancée sur les 15 ans à venir,  pour améliorer nos capacités à faire face aux exigences et aux défis de la vie quotidienne.

Où en est-on actuellement sur la question des CPS ? Quels points de vigilance et axes prioritaires pour répondre collectivement à cette ambition ?

Les institutions françaises s’engagent en faveur des compétences psychosociales pour le bien-être des générations futures

Savoir résoudre des problèmes, gérer son stress, avoir une bonne connaissance de soi, une pensée critique, entretenir de bonnes relations… Tout le monde est d’accord : c’est essentiel pour notre bien-être et notre vie sociale. Ces aptitudes, que l’on appelle des compétences psychosociales (CPS), se construisent dès l’enfance et peuvent se renforcer tout au long de la vie.

Le concept de CPS voit le jour dans le cadre de programmes dans les pays Nord-Américains dans les années 1970. Il lui faudra cependant presque 20 ans pour traverser l’Atlantique ! En France, cela fait plus de 30 ans que des professionnels, au quotidien avec les enfants, expérimentent des activités et des manières de faire pour les aider à développer ces compétences. Les enseignants, animateurs, éducateurs ont été rejoints par des chercheurs. Et progressivement la connaissance s’est structurée. Les programmes de développement des CPS connaissent un réel essor et l’on sait mieux aujourd’hui comment contribuer efficacement à renforcer les compétences psychosociales, grâce à des données probantes issues à la fois des recherches interventionnelles et des analyses et expériences d’acteurs de terrain.

En 2022, deux publications majeures sont venues confirmer les enjeux sanitaires, éducatifs et sociaux liés au développement des compétences psychosociales :

Plus d’infos sur le référentiel de Santé publique France

Les compétences psychosociales : un référentiel pour un déploiement auprès des enfants et des jeunes

Il s’agit d’une synthèse des connaissances autour du développement des CPS, issues de la littérature scientifique internationale et nationale. Le référentiel propose une nouvelle définition, affine la classification et présente les différentes terminologies et concepts associés. Des exemples d’activités illustrent des manières de les mettre au travail lors de séances avec des enfants ou des jeunes. 

  • Un chapitre explique l’histoire du développement des CPS en France, ainsi que leur inscription progressive et multiple dans différentes politiques publiques nationales et territoriales (santé publique, enseignement et éducation, protection de l’enfance).
  • Les effets des programmes CPS probants sont détaillés en prévention des risques (addictions, risques sexuels, violences) et en milieu scolaire (climat scolaire, réussite scolaire). Les critères d’efficacité et facteurs de réussite de ces interventions sont développés.
  • Enfin, le référentiel présente les deux types d’évaluation qui existent autour des programmes/actions CPS (évaluations de recherche et évaluations de terrain), en rappelant les étapes clés de méthodologie. 
Plus d’infos sur l’instruction interministérielle

L’instruction interministérielle relative à la stratégie nationale multisectorielle de développement des compétences psychosociales chez les enfants et les jeunes 2022 – 2037
Cette instruction porte un objectif ambitieux et générationnel qui est de permettre à tous les enfants de la génération 2037 de développer leurs compétences psychosociales dès le plus jeune âge, pendant toute leur croissance et dans les milieux de vie qu’ils vont fréquenter la maison, les structures d’accueil du jeune enfant, les établissements scolaires, les structures d’insertion professionnelle…).

Si ces dernières années de plus en plus de programmes compétences psychosociales ont vu le jour, pour que la génération 2037 soit la première à grandir dans un environnement continu de soutien au développement des compétences psychosociales, cela suppose que d’avantage d’acteurs portent cette démarche. 

Le déploiement de cette stratégie nationale repose sur cinq axes :

  • Confier aux territoires l’animation et la coordination du déploiement des interventions de développement des compétences psychosociales.
  • Accompagner les professionnels intervenant auprès des enfants, des jeunes et des familles afin qu’ils aient la capacité de développer les compétences psychosociales des enfants, des jeunes et de leurs parents.
  • Appuyer les interventions de développement des compétences psychosociales sur des données probantes.
  • Mettre en place, d’ici 2023, un système national de suivi et d’évaluation du déploiement des CPS dans tous les secteurs.
  • Mettre en place un cadre institutionnel qui assure à la génération 2037 un environnement de développement continu des compétences.

Cette actualité renforce le bien-fondé et la nécessité de travailler autour des compétences psychosociales. On peut tout à fait se réjouir de cette ambition nationale qui rejoint un des axes stratégiques de la charte d’Ottawa, cadre de référence en promotion de la santé : l’importance de renforcer les « aptitudes indispensables à la vie ». En effet, au fil de son histoire, chacun développe des manières d’être, de faire, qui lui permettent d’agir dans sa vie quotidienne.

Mais chaque personne évolue dans des milieux de vie particuliers, où elle se développe, apprend, communique, réfléchit, agit. Où elle est soumise à des conditions matérielles et socio-économiques particulières. Les milieux de vie ont ainsi toute leur importance car ils peuvent favoriser ou entraver le développement et la capacité d’agir de chacun. Aussi l’ambition portée par l’instruction interministérielle constitue une opportunité pour la santé des populations à condition de ne pas exclusivement travailler sur les compétences individuelles mais de travailler aussi sur les environnements de vie. Par exemple, dans la lutte contre le stress, il ne s’agit pas uniquement d’apprendre aux personnes à gérer leur stress, mais aussi de modifier l’environnement, dans le cas où celui-ci est stressant.

L’enjeu est de taille… et le travail à mener l’est tout autant !

Cette ambition interministérielle signifie qu’une majorité, si ce n’est l’ensemble, des professionnels en contact avec des enfants et des jeunes devra d‘ici 2037 s’approprier ce que sont les compétences psychosociales. Dans chaque lieu destiné aux enfants et aux jeunes, ces professionnels devront analyser comment, dans leur travail, dans leurs interactions, ils peuvent agir pour contribuer à renforcer les compétences psychosociales des enfants et des jeunes.

Cela signifie aussi que cette culture commune autour des compétences psychosociales puisse se partager avec les parents, premiers éducateurs des enfants.
Concrètement, cela se traduit par :

– Connaître ce qui se fait déjà,
– Expliquer les compétences psychosociales et comment elles peuvent s’intégrer dans les missions des différents adultes en contact avec les enfants et les jeunes,
– Former (formations initiales et continues),
– Soutenir la création et l’animation de séances avec les enfants et les jeunes,
– Pérenniser l’animation des séances,
– Favoriser les échanges de pratiques,
– Actualiser les connaissances des professionnels lors de changement dans les équipes,
– Sensibiliser et accompagner les familles,
– Faire du lien localement entre les différentes actions et partenaires sur le sujet.

Le travail à mener, à la hauteur de l’enjeu, est donc considérable. Il nécessitera pour chaque étape des moyens importants.

Appropriation des connaissances et partenariat : les clés de la réussite ?

Il sera essentiel d’accompagner l’appropriation des connaissances et des manières de faire pour développer les CPS des enfants et des jeunes.

Le référentiel proposé par Santé publique France est une aide théorique majeure.  Il constitue en effet un état des connaissances actuelles permettant d’y voir plus clair dans ce champ foisonnant.
Il faut dire que de nombreuses ressources existent : il suffit de taper les mots « CPS ou compétences psychosociales » dans un moteur de recherche pour accéder à des articles, des livres, des sites proposant théories et outils, des parcours de séances, des retours d’expériences, etc.

Mais au-delà de l’accessibilité des données, l’important sera que ces données soient comprises, notamment sur :

  • L’objectif  : « Qu’est-ce que je cherche à faire ? »
  • Les modalités possibles  : « Où, quand, comment, avec qui puis-je agir ? »
  • Les ingrédients nécessaires : « Comment m’y prendre ? A quoi dois-je penser ? »
  • Le choix et la sélection des outils : « Je sais ce que je veux faire, quand et comment, mais de quels outils aurai-je besoin ? »

Les acteurs n’ont en effet pas tous les mêmes facilités et leviers d’action.
Par exemple, dans une école maternelle ou élémentaire, un enseignant peut intégrer des ateliers autour des CPS dans l’emploi du temps, car la stabilité du cadre de la classe s’y prête.
Mais pour l’animateur périscolaire, en fin de journée, il est plus difficile de proposer des ateliers à des enfants fatigués et réunis en groupes hétérogènes ; l’animateur peut néanmoins organiser l’espace pour que celui-ci s’ajuste le mieux possible aux besoins des enfants (jeux ou repos, en collectif ou en individuel, pause ou devoirs).
L’agent de restauration, en concertation avec ses responsables, peut lui travailler sur l’ambiance sonore à la cantine, en agissant sur les aspects matériels mais aussi relationnels, en aidant par exemple les enfants à tenir un volume sonore acceptable pour chacun.
Quant à l’AESH (accompagnant d’élèves en situation de handicap), il peut avoir comme levier d’action la relation individuelle qu’il entretient avec un enfant en particulier.

Ainsi chacun, au travers de ses missions, peut contribuer au développement des compétences psychosociales
Toutefois, pour pérenniser leurs actions et installer de la cohérence, pour que les enfants expérimentent et observent la mobilisation des CPS à l’école au fil de la journée, les professionnels auront tout intérêt à travailler ensemble. Cela signifie partager leurs informations et leurs intentions, s’entendre sur un objectif commun, partager leurs outils et manières de faire, s’engager ensemble au service du bien-être à l’école. Et associer autant que possible les familles à leur démarche ou à minima communiquer sur leur travail.

Tout cela constitue du partenariat. Une notion fondamentale puisque le partenariat contribue à la cohérence, la pertinence, le développement de compétences et la créativité des projets. [1]
Si le partenariat est nécessaire à l’échelle d’une école, il l’est tout autant dans un spectre beaucoup plus large . L’instruction interministérielle propose que « le développement des CPS, dès le plus jeune âge se pense comme un appui et apprentissage continu, à intégrer dans le quotidien des enfants et des jeunes à tous les temps de vie. » On comprend donc bien la nécessité de développer des partenariats, à plusieurs niveaux (une commune, un quartier, une structure, …) pour assurer un déploiement de qualité de cette ambition [2] .

En complément du niveau local, pour que cette ambition nationale soit possible, il apparait indispensable que de solides collaborations existent entre les financeurs et les acteurs institutionnels du monde de la santé publique, du monde scolaire, des collectivités territoriales, de la recherche et des acteurs de la promotion de la santé. Le site internet ressource national (SIReNa), porté par la Fédération nationale d’éducation et de promotion de la santé et qui verra le jour fin 2023, s’inscrit dans cette dynamique nationale.

Le trio gagnant : séances / postures / environnement 

Il est également reconnu qu’avoir des interventions simultanées à 3 niveaux participe à la qualité des actions : 

  • les activités formelles, avec la mise en place d’ateliers auprès des enfants et des jeunes,
  • les activités informelles, soit la posture adoptée au quotidien,
  • les activités sur les environnements sociaux, physiques et organisationnels.

Ce trio gagnant permet aux professionnels d’entrer dans la démarche à leur rythme et selon leurs possibilités d’action.
Concrètement, qu’est-ce que ça veut dire ? 

Pour conclure…

Pour relever le défi des CPS à l’horizon 2037, les institutions, les chercheurs, les professionnels de terrain devront oeuvrer ensemble, chacun avec son expertise et de sa place. Au fur et à mesure de la mise en œuvre de cette politique publique, l’IREPS ARA mettra son savoir et son expérience au service de ce projet de société.

Notre dispositif Emergence permet aux professionnels :

Rédaction : Soizic BRUNET et Isabelle JACOB – Promotion Santé ARA
Pour aller plus loin

Intégration du concept dans les pratiques en France
Retrouvez dans l’entretien accordé par l’infirmière de santé publique Marie-Odile Williamson à Promo Santé Ile de France les différentes étapes de développement des CPS sur la période 1993 – 2018 :

  • Les années 1990, plaidoyer et exploration ;
  • Les années 2000, ancrage dans les recommandations et les pratiques ;
  • Les années 2010, croissance et maturation, avec de plus en plus de recommandations et des professionnels toujours plus nombreux à s’engager dans l’action. On assite alors à une montée progressive d’une « culture CPS » s’intégrant progressivement dans des politiques publiques. C’est également à cette période qu’un outil, aujourd’hui largement connu et utilisé voit le jour « Le cartable des compétences psychosociales ».

Références

[1] Corbin et Mittelmark, 2008, Kegler et al., 2007 ; Kegler et Swan, 2012 ; Cheadle et al., 2008, Willis et al., 2017, (Richez-Battesti et al., 2013).
[2] Pour aller plus loin : Fiche repère « Le partenariat en promotion de la santé : ce qu’il recouvre, ce qu’il produit et le faire vivre en pratique » IREPS ARA, 2019.

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